En ouvrant les yeux ce matin-là encore, tu remarques le changement. C’est comme tout ce que tu vis était maintenant différent, comme si l’intensité de chaque instant avait changé. Ta dernière rencontre avec Haya avait très clairement changé ta vision des choses, des gens, de la vie. Tu les savoure… différemment. Tu restes bien sûr le même, simplement, ton cerveau tourne autrement, parfois plus lentement, parfois plus vite. Tu ne peux encore dire si c’est bénéfique mais tu n’as rien vu d’anormal jusque là. Alors tu savoures, tu joues ton rôle à la perfection, essayant chaque seconde de penser à Haya, si loin de toi.
Quelle fut ta surprise ce jour-là lorsqu’à ton bureau, on t’emmène les demandes pour entrer sur le territoire. Tu ne lésines pas sur cette partie de ton devoir, tu ne peux pas laisser entrer n’importe qui sur ton île. Tes habitants comptent sur toi pour être sélectif. Généralement, ceux qui viennent d’Amanh ont rarement la chance de pouvoir mettre un pied chez toi. Ceux qui viennent de Laeticia Mae ont intérêt à être irréprochable et à avoir une bonne raison de vouloir entrer chez toi. Tu es généralement plus clément avec ceux qui viennent de Shangri-La. Sans dire que tu as confiance, les fidèles d’Artémis ne sont pas ceux dont tu te méfies le plus. Tu apportes quand même une certaine méfiance envers tout ceux qui passent les ponts de Noxis. Mais ce matin, un nom vient frapper ton esprit, ébranler ton coeur et attiser ta curiosité. Circé. Il ne peut pas y en avoir d’autres, tu sais de qui il s’agit.
Ça tombe plutôt bien puisque tu voulais aller la confronter. Haya t’a parlé de leur petite confrontation et tu comptes bien faire de même avec la Fae. Comment peut-elle avoir le culot de s’en prendre à celle que tu aimes. Colère ? Jalousie ? Tu te fiches des raisons qui l’ont poussé à le faire, tu veux simplement t’assurer qu’elle ne viendra plus mettre le bout de son nez dans ton histoire. Et puis… tu es aussi en demande de réponses. Comment est-elle en vie ? Ou était-elle depuis tout ce temps ? Pourquoi cette haine à ton égard ? Rien n’est normal dans cette histoire. Tes espions l’ont vu sur Amanh, tu sais qu’elle y vit dans une maison reculée. Tu as aussi vite comprit les addictions qui l’animent, faits qu’elle n’avait pas avant la destruction. Tu ne connais par contre pas le rôle de Dionysos dans cette histoire mais le connaissant, rien de réjouissant. « Acceptée. A midi. J’y serai mais elle ne doit pas le savoir. » Tu confies à ton garde qui transmettra tes acceptations. Tu peux voir la surprise sur son visage mais tu ne réagis pas, ça ne le concerne pas.
L’heure fatidique arrive à grand pas alors tu quittes l’obélisque pour te rendre à l’entrée du pont entre Noxis et Amanh. Chacun est choqué de ta présence, ce n’est pas un endroit que tu visites souvent. Mais chacun comprendra vite les raisons de ta venue. « Elle arrive Dieu Arès. » Tu ne réponds pas à ton garde, tu ne le regardes pas, tu restes debout, les bras croisés, ferme et déjà empli de colère. Même penser à Haya ne calme le sang qui pulse dans tes veines. Peut-être aussi que tu joues contre ton coeur blessé et ça, ça fait mal. Lorsque tu aperçois son visage, tu te souviens de tous les instants passés à ses côtés. Les bons et les mauvais. Tu ne peux pas effacer de ton esprit plus de cent ans de ta vie. Elle a fait de toi un homme heureux. Aussi heureux que tu pouvais l’être à l’époque en tout cas. Rien de comparé avec les maux fabuleux de ton coeur actuel.
« Bonjour Circé. Ne pose pas de questions sur cet accueil, sens toi privilégiée que le Dieu Arès en personne te reçoive. Je te demande de me suivre et d’oublier l’idée de trouver ta stupide plante. » Tu annonces tout bonnement, sans prendre de tact, sans prendre de forme. Tu veux lui faire comprendre que là, c’est toi le maitre, qu’elle ne peut pas prendre le dessus. Ici, c’est tes règles, tes loins, tu décides de tout et personne ne peut te contredire. « N’espère pas quitter l’île, je déciderais de ton départ et si tu déroges à ma règle, c’est la mort qui t’attend, mes gardes respectent scrupuleusement mes ordres. » Tu ajoutes pour calmer les idées qui pourraient naitre dans son esprit. C’est loin d’être un accueil chaleureux mais c’est le mieux que tu puisses faire. Tu es en colère. Contre elle, contre ses agissements, contre sa haine, contre sa présence. Tu l’as pleuré pendant des années et maintenant, quand tu regardes son visage, il a le gout de guerre. « On y va. » Tu dis fermement et froidement avant de commencer à avancer. Des gardes vous suivent et poussent Circé à te emboiter ton pas. Vous vous dirigez vers l’un des bâtiments les plus proches ou vous pourrez discuter en toute intimité.